Les concours hippiques font vibrer de nombreux cavaliers tous les weekends. Ils sont bien plus qu’un simple bon moment pour beaucoup d’entre nous. Mais savez-vous d’où ils viennent ? Comment on en est arrivé là ? Non ? Alors on va tout vous dire.
L’Antiquité, le début des concours hippiques
Hé oui ça date pas d’hier ! Les courses de chars ça vous dit quelque chose ? Une sorte de course de trotteurs attelés mais avec jusqu’à 4 chevaux de front et qui vont très vite ! Les Romains en étaient fans ! Les Grecs aimaient les courses attelées et montées, le PMU avant l’heure !
Vous avez là l’authentique ancêtre des concours hippiques. Tous les coups y étaient permis. Les concurrents devaient parcourir 7,5km sur une piste dont le centre est occupé par un mur.
Il y avait des factiones , des équipes professionnelles. Chacune avait une couleur correspondant à un grand propriétaire et à une faction de supporters. Il y avait les Blancs (albata), les Bleus (veneta), les Verts (prasina) et les Rouges (russata). Mais rapidement les Verts avaient absorbé les Blancs. Les Rouges fusionnèrent avec les Bleus. Le peuple est pour les Verts et l’aristocratie les Bleus. C’est l’ancêtre du maillot de football !
C’était vraiment le sport populaire par excellence avec les combats de gladiateurs. Par exemple à Rome le Circus Maximus a pu accueillir jusqu’à 280 000 spectateurs contre 81 338 pour le Stade de France aujourd’hui !
Le Moyen-Âge, source inépuisable de concours hippiques
A l’époque pas moyen de se déplacer ou d’aller à la guerre sans les chevaux ! Ils sont donc très importants dans la société. Encore aujourd’hui nous avons hérité de nombreuses choses d’eux, comme par exemple le fait de monter à droite, car à l’époque pas le choix à cause de l’épée !
Les courses à cru, le début des concours hippiques version hippodrome
Les courses se disputaient à cru, dans les villes, le long des rues ou autour des places. Aujourd’hui encore on continue de le faire dans les palii italiens, notamment le Palio de Sienne par exemple. C’était très populaire, un peu comme les courses de chars chez les Romains. Plus tard ce sont les Rois de France et d’Angleterre qui ont lancé les courses hippiques version moderne, avec de gros paris !
Les joutes de chevalerie
Nous voilà au 12ème siècle en France ! A cette époque il n’y avait pas de lice pour protéger les concurrents qui s’élançaient et se faisaient parfois face en mêlée. Le risque de blessures graves était très important car les chevaux et les cavaliers pouvaient s’entrechoquer de face et très violemment au galop.
L’objectif du jouteur n’était pas de faire chuter son adversaire. Pour être déclaré vainqueur, il fallait briser le plus de lances possible sur l’armure des autres jouteurs. En cas d’égalité, la longueur du morceau brisé permettait de départager les deux chevaliers.
Les chevaliers étant avant tout des guerriers, ce n’est pas étonnant de les voir dans un sport aussi dangereux ! Ok là on est loin de nos concours hippiques modernes. Mais avec le temps il y a eu des progrès. Par exemple à partir de 1420 environ, une barrière, la lice, apparaît en Italie, principalement pour des raisons de sécurité. Les chevaliers galopaient alors le long de cette lice en sens inverse, chacun ayant la barrière à sa gauche.
Encore aujourd’hui des passionnés pratiquent des joutes modernes, en moins dangereux !
Le rôle clef de la chasse à courre dans l’évolution des concours hippiques
Vous aimez le cross et le CSO ? Savez vous que ces disciplines ont de nombreux points communs avec la chasse ? Lors des chasses à courre, par le passé notamment, il était courant que les cavaliers aient à sauter des rivières, des haies … Ou n’importe quoi d’autre. Ils le faisaient sur des terrains très variés souvent en allant très vite pour suivre les chiens.
Ça ne vous rappelle rien ? Vous pensez peut être un peu au cross ? Si oui vous avez raison ! Le cheval de chasse est un véritable athlète capable de chasser durant de longues heures, qui n’a peur de rien. A la fois sauteur et cheval d’endurance, il a de nombreux points communs avec le cheval de CCE !
L’équitation militaire, la base de l’équitation moderne
Pluvinel, François Robichon de La Guérinière, Cazaux de Nestier, le général Alexis L’Hotte ou encore le Capitaine de Saint Phalle … Ces noms ne vous disent rien ? C’est un infime aperçu des écuyers qui ont marqué leur temps et transformé l’équitation. Encore aujourd’hui nous utilisons les méthodes et les principes qui sont issus de leurs travaux. Il existe par exemple le mors de bride l’Hotte que vous trouvez dans toutes les selleries !
Les figures du dressage modernes sont issues de l’équitation de guerre. C’est la sublimation des mouvements utilisés par le cavalier sur le champ de bataille afin de montrer la qualité du dressage du cheval, sa soumission (encore notée aujourd’hui !) et l’habilité du cavalier.
C’est une équitation de tradition qui a énormément évolué. Cette équitation aurait pu disparaître avec l’avènement de l’équitation moderne. Par exemple les compétitions de dressage ne comportent pas d’air de haute école dits au-dessus du sol comme le pas espagnol, la croupade et la levade. Le Cadre Noir de Saumur en France ou encore l’Ecole de Vienne sont les garants de cette équitation de tradition qui a donné naissance à notre équitation classique.
Les premiers concours hippiques : merci aux militaires
C’est bien aux militaires que nous devons les premiers concours hippiques. L’esprit de compétition a toujours été très important pour les militaires afin de les pousser à se dépasser et aller toujours plus loin dans l’excellence.
L’ancêtre du concours complet : le « concours du cheval d’armes »
Parlons un peu concours complet. On appelait ça «concours du cheval d’armes». Le but était de tester les capacités des chevaux en endurance, force et dressage.
En 1912 le concours complet devient une discipline olympique. Il n’y a que des militaires qui sont en compétition.
L’épreuve est nommée « military » car là ce sont bien les qualités guerrières du couple cheval / cavalier qui sont testées. C’est vraiment la suite des concours du cheval d’armes qui deviennent vraiment officiels. Ici on a en mémoire les charges de la cavalerie du temps des campagnes de Napoléon par exemple et même bien avant. La vie du cavalier dépendait alors en partie de qualité du cheval / de son dressage !
On commence donc par une course d’endurance de 50km, puis une course de vitesse de 3500m avec 10 efforts. La troisième épreuve est un saut d’obstacles de 15 sauts d’1m30 de haut maximum pour 3m de large. La dernière et quatrième épreuve est un dressage. Ce dressage est composé de changements d’allures, de direction, de cercles et de tours sur les hanches. On cherche à voir le niveau de dressage des chevaux destinés à la guerre. Ils devaient finir leur reprise en sautant quatre obstacles allant jusqu’à 1,10 m de hauteur, un obstacle de volée de 3 m de large et également participer à un « test d’obéissance » dans lequel le cheval doit se déplacer à travers ou entre différents objets.
Dans certains pays du Nord le cross est toujours appelé military, comme quoi même si le contenu a changé, on n’oublie pas d’où vient cette discipline !
Le saut d’obstacle, une discipline qui commence à s’éloigner du militaire
A l’origine des concours hippiques de saut, on était loin de ce que vous connaissez actuellement. La technique de saut n’était pas du tout la même. A l’époque on pensait aider le cheval à lever l’avant main pour sauter en tirant fortement sur les rênes à l’abord de l’obstacle.
A la fin du 19ème siècle les Français ont inventé les rênes coulissantes qui permettaient au cheval d’allonger son encolure pendant le saut, le cavalier gardait les doigts entrouverts pour laisser filer les rênes pendant le saut, tout en conservant le buste très droit, bien assis dans sa selle. C’est ce que vous voyez sur ces photos montées en film de 1887.
Notre technique actuelle est née au début du 20ème siècle. Inventée par Federico Caprilli, italien, il prône la monte en suspension pour soulager le dos du cheval et préconise le basculement du buste afin d’accompagner le mouvement du cheval pendant tout son saut.
Sa technique, très rapidement adoptée à Saumur, a connu des adaptations par la suite mais vous montez tous comme ça.
Une première apparition olympique en 1900
En 1900 à Paris c’est une première. C’est le retour des chevaux dans les Jeux Olympiques modernes, n’oubliez pas qu’il y avait des courses dans les jeux antiques !
Les épreuves avaient lieu en parallèle de l’Exposition universelle de 1900, cinq épreuves sportives et de présentation sont prévues au programme. Seules les trois épreuves sportives composées du saut d’obstacles, du saut en hauteur et du saut en longueur sont reconnues officiellement par le Comité international olympique.
- Le saut d’obstacle
C’est un parcours de 22 obstacles sur 850m. Il y a des barrières simples, une rivière, un double, un triple, un mur et une banquette irlandaise. La hauteur varie entre 1m10 et 1m20. La rivière fait 4m de large. C’est le chronomètre qui a permis de départager les sans faute.
2. Le saut en hauteur
C’est l’équivalent d’une puissance aujourd’hui. C’est la seule fois qu’une telle épreuve aura lieu aux JO. Très populaire et courante à l’époque c’est aussi très spectaculaire. Malgré un terrain très lourd, deux cavaliers arriveront à franchir 1m85 et seront 1er ex-aequo. Le français Dominique Maximien Gardères y parvient avec son cheval Canela (1,59 m au garrot), et l’italien Giovanni Giorgio Trissino également avec son cheval Oreste (1,64 m au garrot). On est loin de certains grands selles français du saut d’obstacle moderne !
3. Le saut en largeur
L’idée est de franchir une rivière sans toucher le ruban rouge déposé de l’autre côté de l’obstacle et à mesurer la longueur du saut. L’épreuve est remportée par le belge Constant van Langhendonck, en selle sur Extra Dry. Il parviendra à franchir 6,10 m. Les chevaux classés suivant parviennent, eux, à franchir 5,70 m, 5,30 m et 4,90 m. Avec un sol très boueux c’est impressionnant !
Le concours hippique originellement plus proche du hunter
Retour en 1912 à Stockholm ! Le parcours compte 29 sauts et certains obstacles sont à passer plusieurs fois. Il y a des pénalités à chaque barre tombée, refus ou encore chute (normal jusque là). Si une barre est touchée mais ne tombe pas il y a aussi des points. La hauteur des obstacles n’excède pas 1,40 m. Un poids minimum de 75 kg porté par le cheval est demandé. En individuel c’est le capitaine français Jacques Cariou avec son cheval Mignon qui gagne la médaille d’or avec 186 points.
C’est en 1924 et à Paris que le CSO, le CCE et le dressage sont enfin dans une forme moderne telle que nous les connaissons.
Les cavaliers militaires toujours très présents à haut niveau
Thibaut Vallette, Donatien Schauly, Arnaud Boiteau, ces noms ne vous disent rien ? Si on vous parle du Lieutenant Colonel Thibaut Vallette, de l’adjudant Donatien Schauly ou encore de l’Ecuyer du Cadre Noir Arnaud Boiteau vous voyez le point commun ? Ces 3 cavaliers de concours complet de niveau international sont des cavaliers militaires.
Thibaut Vallette est quand même l’un des cavaliers médaillé d’or aux JO de 2016 à Rio ! Il est aussi quand même 13ème en individuel.
Voilà pour le concours complet qui reste LA discipline avec le dressage classique où excellent nos militaires.
En 2017 les championnats du monde d’équitation militaire avaient lieu à Fontainebleau, le grand vainqueur est l’adjudant Donatien Schauly qui a devancé le lieutenant-colonel Thibaut Vallette. La France a également gagné par équipe.
Que ce soit sur les terrains civils ou militaires, les cavaliers de l’armée sont encore et toujours parmi les meilleurs.
Voilà vous en savez d’avantage sur l’origine des concours hippiques ! Et n’oubliez pas que les cavaliers qui ont fait votre sport méritent bien un peu de place au panthéon de l’équitation. On était loin de Pénélope Leprévost, Kevin Staut ou Patrice Delaveau, loin de notre technologie, de notre sélection génétique … Mais la qualité des cavaliers et des chevaux était bien là !
Une petite citation de François Robichon de La Guérinière pour vous donner un peu matière à réfléchir :
« La connaissance du naturel d’un cheval est un des premiers fondements de l’art de le monter, et tout homme de cheval en doit faire sa principale étude. »
Source photo à la une : Netherlands Olympic Committee 1928 / montage par Maëlle Razatovo